L’expérience Tempête sous un crâne
C’était la loose intégrale ce matin. Grève SNCF. Quand on doit prendre un train c’est déjà chiant, mais quand en plus il y a une correspondance, c’est mission impossible. Donc j’ai loupé le train que j’avais visé pour aller bosser. En attente à Saint-Lazare pendant une demi-heure, j’appelle pour prévenir mes élèves du matin de ne pas venir. Du coup j’appelle ma mère en pleine gastro. Et l’heure du train approche, et je commence une de mes fameuses migraines.
Preuve que j’ai bien changé, je décide de rentrer chez moi plutôt que de braver la douleur et d’aller bosser quand même. J’annule tous mes élèves (je suis bon pour rattraper tout ça plus tard). Je me couche. Je prends des médicaments, j’attends que ça passe. Ca passe pas, mais j’ai pas envie de légumer. Je prends mon ordi au lit et je chatte sur internet.
Et puis voilà, un petit dial à la con qui me chauffe, je suis pas bien, mais j’ai envie. Donc rendez-vous dans un quart d’heure chez moi. Evidemment, le mec est moins bien en vrai que sur les photos. Mais bon, ça va quand même, et puis il est grand et il a une belle carrure, tout ce que j’aime.
La grande découverte, c’est l’agitation de son cerveau. Il est hypocondriaque, donc on ne fera rien qui soit à risque (mais de toute façon non, on ne fera rien qui soit à risque, tu me prends pour qui ?). Et surtout, surtout, il a un niveau de maturité digne du copain de mon coloc. C’est-à-dire qu’il pense qu’il a tout bon, qu’il pense qu’il est dans le vrai, qu’il pense que les pédés c’est tous des cons superficiels accrocs au cul. Il a pas forcément tort, mais il ne voit pas qu’il en fait partie. Bref, snob, faussement tourmenté par la fameuse vacuité de l’être qui m’est si chère, et qui ne s’assume pas tout simplement.
Alors pour vous brosser un tableau réaliste, côte à côte à se tripoter pendant qu’il me parle pour évacuer le stress de ce plan ultra soft qui le fait se rendre coupable, car ce n’est tellement pas ça qu’il veut, mais l’amuuuuuuuuuuur, le grand amuuuuuuuuuuuuuuuur, qu’est-ce qu’il fout ce con de prince charmant ?!?!?! J’hésite à lui présenter le boulet de mon coloc, de peur qu’ils se plaisent trop.
Bon avec tout ça, difficile de maintenir une érection. Là je me dis : quand même quel boulet, j’ai pas de chance ! Je sais pas les choisir. Dès qu’ils savent s’exprimer sans fautes et qu’ils ont un minimum d’humour et de culture, ils sont psychopathes !
« Non mais tu vois avant, quand j’avais 20 ans, j’étais mieux foutu, j’ai pris du poids depuis… mais bon si je fais du sport ça revendra peut-être…
_Ben oui regarde, moi je cours régulièrement et depuis j’ai perdu du poids. (Je me trouve sympa à ce moment là de faire la conversation).
_Non mais t’es pas un sportif.
_Ben je l’étais pas mais maintenant ça va.
_Oui mais t’as pas grandi avec le sport, alors que moi oui, c’est pour ça que c’est pas flasque.
_Merci de me dire que je suis flasque (espèce de gros connard !) »
Là je me prépare à le foutre à la porte sans autre forme de procès. Mais il se déclenche sexuellement. On finit de se branler, il part prendre une douche. Je me rhabille.
« Je peux regarder mes mails ?
_(Putain !) Ouais c’est quoi ton adresse ? (Histoire de connaître son nom de famille aussi). »
Tout ça pour vérifier si un mec avec qui il a chatté lui avait répondu à son énième mail de relance. Il est parti pour me lire toute la correspondance (sans réponse de la part de l’autre mec je précise). Je me permets de le couper au bout de deux paragraphes insupportables :
« Non mais moi à la place du mec, je me dis que tu te prends trop la tête…
_Mais il faut arrêter de ne pas se prendre la tête, se prendre la tête c’est sain, c’est comme ça qu’on avance blablablabla….
_Ben écoute t’as raison, sois naturel, tu trouveras plus facilement le mec à qui ça plait dans ce cas là.
_Ouais mais là c’est con parce que lui, pour le coup, il me plaisait vraiment ! »
Prends toi ça dans la gueule Martin… Mais j’ai beau me regarder dans le miroir, je ne vois aucune verrue, aucun furoncle, rien. Je me trouve même plutôt pas mal ces derniers temps, mais je ne me suis jamais pris autant de vents !
Sur le pas de la porte : « Quand j’ai fait ça après je me dis que je recommencerai plus jamais, j’ai trop peur d’attraper une maladie, t’es sûr que t’as pas le sida ?
_Ecoute, là même si je l’avais, il faudrait que je te l’aie transmis par thélépathie…
_Et puis je sais même pas si on se reverra (je lis clairement dans ses yeux qu’il ne compte pas me rappeler mais qu’il a mauvaise conscience, genre je suis tombé amoureux de lui… j’ai envie de dire ouf !)
_Ben écoute, au revoir ou adieu, on verra bien, rentre bien. »
Note pour plus tard : mieux vaut mourir d’une migraine en travaillant, que de faire un plan, si on peut appeler ça comme ça, avec un pauvre mec qui me rappelle cruellement le boulet du coloc.